VAHATRA - Commerce équitable à Madagascar - Poivre sauvage

Assurer la pérennité d'une variété sauvage sans destruction de la forêt

Porté à l'attention du monde de la gastronomie en 2004 par un chef français épris d'épices, le poivre sauvage - Tsiperifery de Madagascar en raison de sa rareté, de son profil gustatif unique et de sa complexité aromatique fait l’objet d’une demande croissante sur le marché international depuis 2010. En quelques années, il s'est créé un marché de niche hautement prisé à l’export en Europe, et surtout en France, qui a connu une expansion explosive.

À peine découvert, le poivre sauvage se voit déjà menacé de disparition. Son exploitation contribue à la destruction de son habitat naturel, tant il suscite les convoitises.

Protéger le Tsiperifery est crucial pour garantir la pérennité de cette ressource et de son écosystème forestier. Travailler directement avec une coopérative de producteurs est un passage obligé pour assurer aux communautés locales la juste appropriation de la valeur qui devrait logiquement leur revenir.

Le Tsiperifery est une ressource naturelle endémique que l'on ne trouve que dans les forêts de l’est malgache. Il ne fait pas l'objet de culture. Tout comme les champignons ou le gibier, le poivre sauvage est un produit forestier non ligneux (PFNL) selon la définition de la FAO, autrement dit un produit collecté en forêt sans qu'il soit nécessaire d'abattre des arbres.

Les premières traces de l'utilisation du poivre sauvage - Tsiperifery remontent à plusieurs siècles dans la culture malgache. Seules les populations vivant aux abords ou dans la forêt l'utilisent comme épice et comme remède médicinal, parfois avec des visées culturelles et spirituelles. Aussi, plus on s’éloigne de la forêt, moins la population utilise ni même connaît ce produit.

Sa récolte est un processus laborieux et délicat. Les cueilleurs doivent se rendre dans des zones reculées de forêt. Les baies de poivre s’organisent en grappes sur de grandes lianes de 20 à 30 mètres qui s'enroulent autour d'arbres tuteurs. Seulement, la liane ne fructifie qu'à la lumière, donc très haut dans la canopée, ce qui rend la cueillette des baies difficile, voire dangereuse. Une fois récoltées, les baies sont séchées au soleil pour préserver leurs arômes uniques.

L’exploitation du poivre sauvage pour la commercialisation à des fins d’exportation est relativement récente. Ce n’est que depuis 2008 que les exportateurs se sont intéressés à ce nouveau marché. Des filières se sont organisées et développées en quelques années. Les populations voisines des forêts collectent et revendent à des opérateurs économiques qui assurent la transformation, l’ensachage et l’exportation. Ces derniers capturent l’essentiel de la rente de la chaîne de valeur. On parle aujourd'hui de plus de 300 tonnes exportées par an.

Depuis l'essor de ces filières, les populations riveraines de la forêt se consacrent largement à la collecte du Tsiperifery. Il revêt une importance socioéconomique considérable pour les populations locales, particulièrement pour les plus vulnérables. Son prix en augmentation rapide du fait de sa rareté, est une source de revenus non négligeable pour les paysans, et ce d’autant plus que le poivre arrive à maturité pendant la période de soudure, entre deux récoltes agricoles.

La demande croissante pour l'épice exotique a entraîné une exploitation anarchique mettant la variété en péril et jetant une pression accrue sur les écosystèmes fragiles de son habitat naturel. Trois facteurs mettent aujourd’hui en danger la ressource : les méthodes de cueillette, l’augmentation du nombre de collecteurs et d’agents commerciaux pratiquant l’exploitation et un accès libre à la ressource.

La cueillette ardue du poivre n’empêche pas sa surexploitation avec des techniques impactantes pour la forêt. La méthode de cueillette la plus répandue consiste à abattre l'arbre tuteur, ce qui est évite de grimper à plus de 15 mètres, hauteur où se situent en général les grappes de baies. Les arbres tuteurs sont en général dépourvus de branches, ce qui complexifie l'accès aux baies sans équipement approprié. La solution de facilité est donc l’abattage du tuteur ou encore l’arrachage pure et simple de la liane. Ces deux techniques compromettent la régénération de la plante et le couvert forestier. Selon Harizoly Razafimandimby, chercheuse au département de recherches forestière et de gestion des ressources naturelles, "avant, quand les cuilleurs partaient collecter, par exemple, 30 kilos de sacs de poivre, ils partaient la journée. Mais désormais, ils partent quasiment une semaine en forêt pour avoir la même quantité."

Compte tenu des revenus engendrés par l’exploitation et de la forte demande, de plus en plus de paysans tendent à s’investir dans l’exploitation du poivre. L'accès à la ressource est libre et la pratique de cette activité ne représente aucun coût pour les cueilleurs. Une hache suffit, aucun autre frais n'est à investir pour la cueillette, si ce n’est quelques heures ou jours dans la forêt.

L'accès à la ressource n’est pas contrôlé. Dans les différents bassins de collecte, les paysans exploitent les ressources forestières sans réglementation, que la forêt soit constituée en aire protégée ou non.

Tous les agents de la filière, des cueilleurs aux exportateurs, sont poussés à prospecter de nouveaux bassins de collecte à travers les corridors forestiers. C'est la course au Tsiperifery avec un avancement dramatique du front pionnier, des bassins traditionnels de collecte vers l'intérieur de la forêt.

Avec Vahatra, nous tentons d'inverser ces logiques. Vahatra travaillent en effet avec le Ministère de la forêt qui lui délivre une convention de collecte. En contrepartie, les producteurs participent au reboisement de la forêt. Les auditeurs bio exigent également cette convention pour pouvoir obtenir la certification Agriculture Biologique.

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À peine découvert, le poivre sauvage se voit déjà menacé de disparition. Son exploitation contribue à la destruction de son habitat naturel, tant il suscite les convoitises.

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